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50 millions de Peugeot plus tard… ou de la Type 1 à RCZ

20/01/2012
Le Saint Empire Romain germanique né sous Frédéric Barberousse en 1157 tirait sa révérence, Beethoven n’avait pas encore écrit sa 7e Symphonie et Napoléon venait d’épouser Marie-Louise dans le salon carré du Louvre. Nous sommes en septembre 1810, Jean-Pierre et Jean-Frédéric Peugeot, issus d’une famille connue en Franche-Comté depuis le XVe siècle, et propriétaires d’un moulin à grains à Hérimoncourt, s’associent à Jacques Maillard-Salins pour fonder la société Peugeot-Frères et Jacques Maillard-Salins, société qui va se spécialiser dans l’acier laminé et le petit outillage.

 

 

Sochaux n’est même pas un bourg

En cette année 1810, celle du Code Pénal et des 130 départements de l’Empire, celle qui verra naître les futurs romantiques Chopin, Schumann et Musset, on n’imagine même pas ce que sera l’automobile. En fait, le monde industriel n’a guère évolué depuis la Révolution, près de 80% des fortunes nées de l’industrie datent d’avant 1789. C’est dire. Tout au plus, celle qui deviendra le symbole de liberté tout au long du XXe siècle, n’est apparue que dans l’imagination de quelques génies visionnaires, à l’instar de Léonard de Vinci qui évoquait au XVe siècle une voiture sans chevaux dans le « Codice Atlantico »… ou plus concrètement avec les travaux de Ferdinand Verbiest et sa machine à vapeur au milieu du XVIIIe. Mais nous sommes encore loin du tricycle à vapeur Serpollet-Peugeot qui sera présenté en 1889 lors de l’Exposition Universelle de Paris, sorte de mixte entre le tricycle et l’auto avec sa chaudière à vaporisation instantanée.

Et Sochaux donc ? Coincé entre deux massifs, le Jura et les Vosges, la fameuse trouée de Belfort, le village de Sochaux est sous la protection des Comtes de Montbéliard depuis plusieurs siècles, on dit qu’au XVIe, le Grand Frédéric de Wurtemberg serait venu passer ses vacances au bord de l’Allan. Peut-être dans cette « Maison du Prince », aujourd’hui la plus ancienne du village.

 

L’aventure peut commencer…

Dès 1819, la société devient « Peugeot Frères et Compagnie » avec l’apport de nouveaux capitaux. Après la construction d’une nouvelle usine de laminage à chaud à Valentigney (près de Sochaux) en 1825 , d’autres activités, comme la fabrication d’objets (scies et mécanismes d’horlogerie) viendront s’ajouter au laminage, jusqu’à l’apparition du premier moulin à café produit par Peugeot en 1840, moulin qui restera au catalogue jusqu’en 1975. Suivront le moulin à poivre, les baleines de corsets et les machines à coudre, la famille Peugeot ayant acheté le brevet de Pierre Carmien en 1868 sur les machines à coudre à navette (avec pédale aux pieds).

En ce milieu de XIXe siècle, au moment où le Lion est déposé au Conservatoire Impérial des  Arts et Métiers (en 1858), les fils de Jean-Pierre, Jules et Emile, s’associent à un neveu pour créer la Société Peugeot Frères. Ils laisseront à leur tour les rênes  à Eugène et Armand… Armand que l’on qualifiera très vite de visionnaire, eu égard à sa perspicacité en matière d’investissements, on fera allusion à l’orientation de l’entreprise vers d’autres productions, et notamment celle de la bicyclette : grand bi, tricycle et bicyclette feront fureur en cette fin de siècle et vont assurer la prospérité du Pays de Montbéliard.

Clin d’œil à histoire ou au destin, les vélos Peugeot ouvriront une boutique avenue de la Grande Armée à Paris… adresse actuelle du siège de l’entreprise.

Mais Armand veut aussi motoriser tout ce qui roule ! Deux roues c’est bien, quatre avec un moteur c’est encore mieux ! Mais faut-il encore y croire. Aux portes du XXe siècle, les deux cousins Eugène et Armand ne sont plus au diapason quant à l’évolution de leurs affaires. Ils se séparent, et en 1896, alors que Félix Faure venait de conquérir Madagascar, Armand fonde la Société des Automobiles Peugeot, une suite logique aux premières tentatives en la matière après la production en 1891 de la Type 3, la première Peugeot à pétrole avec moteur Daimler. Bien sûr, les débuts seront modestes, environ 500 voitures seront vendues pour la seule année 1900. Mais la suite est prometteuse…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

En voiture donc !

Le cap est donné, désormais on fera des automobiles en plus des cycles, un siècle d’expansion extraordinaire se prépare, il ne faut pas manquer ce rendez-vous. Et pile cent ans après la première création et il y a donc cent ans aujourd’hui, naissait la Société Anonyme des Automobiles et Cycles Peugeot.

Aux usines de Beaulieu et de Valentigney s’ajouteront celles d’Audincourt et de Lille. L’aventure est passée de l’artisanat à l’industrie lourde, Sochaux deviendra en quelques décennies l’un des plus grands sites industriels d’Europe. Il comptera jusqu’à 40.000 salariés dans les années 70 (environ 13.000 aujourd’hui), et aura en charge tout ce qui touche à la fonderie, à la forge et à l’emboutissage des châssis.

Créé en 1912 sous la présidence d’Armand Fallières, le site de Sochaux, qu’on appellera « le laboratoire de la modernité automobile », sera en fait un modèle de développement industriel avec dès 1920 une forge fonctionnant à l’américaine et des fonderies utilisant des machines à mouler hydrauliques à la place des machines à main. Innovations encore dans le système de primes à la performance et avec le service statistiques. 

En 1913, l’usine produit déjà des camions, les premières voitures Types 156 et 161 sortiront en 1921. En 1930, on fêtera la 100.000e voiture produite à Sochaux, en 1977 quelque 9 millions d’autos y auront été fabriquées, et 15 millions en 2007 à l’occasion de la sortie de la 308. Parmi les stars locales, citons les 203, 403, 404, 405, 406, 607, 307 et 308, d’excellents numéros issus du Pays de Montbéliard.

 

Mais n’allons pas si vite…

La première Guerre Mondiale stoppera net les premiers élans de prospérité du monde automobile. Les usines seront mises à contribution pour un effort de guerre colossal : camions, chars, moteurs d’avions, obus sortiront des chaînes de la famille.

La reprise sera difficile, et pour tout le monde. Avant cette 100.000e Peugeot, nous aurons découvert, entre autres, la 163, une auto de conception moderne, et surtout la Quadrilette, premier véhicule économique, pratique, maniable, c’était déjà ce qu’on appelle aujourd’hui une deuxième voiture. Et en 1925, celle-ci sera supplantée par la 5cv, une sorte de « Coccinelle » à la française et avant l’heure dont le succès ne se démentira pas : plus de 33.000 unités seront commercialisées jusqu’en 1928. Et voici la 201 et la crise de 29. Première auto produite en grande série à Sochaux, elle doit justement répondre à la crise : solide, économique, plutôt vaste, équipée d’un moteur de 23 chevaux (pour 80 km/h), elle sera fabriquée jusqu’en 1936 à plus de 140.000 exemplaires. Mais on retiendra d’elle son numéro, le premier d’une longue série à trois chiffres : le premier pour la famille (sa taille dans la gamme), le deuxième un zéro médian, et la génération pour le troisième… système toujours en activité chez le Lion.

 

L’ère du monomodèle

Après la seconde Guerre Mondiale, la marque Peugeot débute sa période « sobre » du monomodèle. Et c’est une future star qui ouvre le bal, la 203 en 1948 : esthétique, technologie et efficacité, c’est le triptyque pour le seul véhicule au catalogue jusqu’en 1955 (685.000 exemplaires), date de la sortie de la 403 dessinée par Pininfarina, l’auto des classes moyennes qui sera la première Peugeot à franchir le cap du million d’unités. 403, puis voici en 1960 la célébrissime 404 qui restera quinze ans au catalogue et trouvera près de trois millions de clients.

Avec les années 70, l’offre s’étoffe et on oublie le monomodèle. 104, la première compacte qui sera le fer de lance pendant la crise pétrolière et la 4 portes la plus courte au monde (3,85 m), 604 et le premier turbo diesel européen, puis 305 et 505 sortiront des chaînes. A cette énumération, les puristes m’obligeront à rajouter l’incroyable 504 qui sera assemblée jusqu’en… 2006 au Nigeria, et que la marque produira à plus de 3,5 millions d’exemplaires.

D’autres phénomènes enrichiront l’histoire du Lion de Sochaux, et comment ne pas citer la 205 née en 1983 et vendue à 5,3 millions d’unités, l’un des modèles mythiques de la marque dont la version GTi apportera une image jeune et sportive à un constructeur souvent associé à la famille.

Les années 80 seront celles de la 405 et de la 605, les années 90 nous feront découvrir la série 6 avec 106, 306, 806, 406 et bien sûr 206.

 

Le troisième siècle Peugeot

19e, 20e et 21e siècles, voici le troisième siècle de l’aventure Peugeot qui connaît une première décennie riche en événements depuis la naissance en 2000 de la grosse berline 607 qui sera associée à quelques premières signées Peugeot comme le filtre à particules, l’allumage automatique des feux et des essuie-glaces, aux sorties des 407, familiale héritière des 403 et 404, 307 et 308, sans oublier les coupés cabriolets 206 CC et 207 CC, responsables du doublement des ventes de cabriolets en France, et ces nouveaux modèles marqués par un double zéro médian comme 1007, 4007, et plus récemment 3008. Et pour conclure cette liste, il faut encore parler de ce magnifique coupé RCZ qui fait entrer la marque dans le club très fermé des constructeurs sportifs. Il faut dire que le tour de chauffe avait été accompli au Mans par l’incroyable 908 HDi qui réalisa le doublé en 2009.

 

Une image paternaliste de l’entreprise

Dès le milieu du 19e siècle, l’entreprise fait figure de pionnier en matière sociale en créant et finançant des institutions de secours, une caisse de pension pour les veuves des salariés, une assurance mutuelle sociale, une caisse de retraite ouvrière, un hôpital gratuit pour les salariés et leur famille, des logements à prix modérés, et en instaurant, plusieurs décennies avant les lois sociales, la journée de 10 heures.

Le « clan des Sochaliens » se veut visionnaire et paternaliste. Tout ne fut pas idyllique, de nombreuses grèves et luttes sociales jalonnèrent l’histoire Peugeot à travers ses différents sites, mais une bonne vision des affaires permit à l’entreprise, lors des bouleversements économiques après les Trente Glorieuses, d’échapper au désastre. A tel point qu’en 1976, Peugeot reprend 90% du capital de Citroën détenus alors par Michelin pour bâtir le Groupe PSA.

Depuis deux siècles, la famille Peugeot a toujours été aux commandes du navire, même lorsque des dirigeants qui n’en étaient pas issus occupaient le fauteuil du boss, Maurice Jordan le premier en 1964, puis François Gauthier, le très médiatisé Jacques Calvet, citons encore Jean-Martin Folz et Christian Streiff.

« Moi, je suis très Peugeot » dit Jacques Brel « l’emmerdeur » à Lino Ventura le tueur, ils sont tous deux dans une 404, l’auto inspirée du style américain avec ses ailerons imaginés par l’aviation. Des millions de Français (et d’Européens) sont ou on été «Peugeot », on ne vend pas 50 millions de voitures par hasard à travers plus de 150 modèles et dans près de 150 pays.

Pour ce bicentenaire, on l’a vu, il faudra mettre en vitrine en plus des autos, de l’outillage, des moulins à café, des machines à coudre et des deux roues, aujourd’hui encore à la pointe de la technologie. Et l’aventure continue, là voici désormais, à côté du moteur hérité de celui de monsieur Daimler, branchée à l’électricité, hybride avec 3008, et tout électrique avec Ion. Mais le Lion est déjà au courant…

 

 

Peugeot en chiffres

En 2009, Peugeot a produit 1.598.489 voitures particulières, dont 657.226 sur des sites français, et 140.941 véhicules utilitaires légers (dont 26.348 en France).

En 2009, on a immatriculé en France 377.658 Peugeot neuves (16,7% du marché) et 66.436 VUL.

Quant au Groupe PSA (Peugeot + Citroën), il a produit 2.762.506 voitures et 279.805 VUL en 2009. Le Groupe est à la 7e place mondiale des constructeurs.

Peugeot produit en France à Sochaux, Rennes, Poissy, Mulhouse et Hordain, mais aussi en Espagne à Madrid et Vigo, en Italie à Val di Sangro, au Portugal à Mangualde, en République Tchèque à Kolin, en Slovaquie à Tmava, en Turquie à Bursa, en Argentine à Buenos-Aires, au Brésil à Porto Real, en Chine à Wuhan, au Japon à Okazaki, et en Iran à Téhéran.

PSA a des accords avec Mitsubishi (4007 et C-Crosser), avec le turc Karsan (Partner Origin et Berlingo First), avec le chinois Hafei (projet d’un véhicule de transport de personnes), avec BMW (moteurs), avec l’indien Caparao India (implantation d’une usine), avec Fiat (partenariat pour les véhicules utilitaires), avec le japonais Sanyo (batteries).

Près de 13.000 véhicules sont fabriqués chaque jour dans les usines du Groupe PSA, ainsi que 11.000 moteurs et 12.500 boîtes de vitesses.

 

 

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