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La « bande des quatre » à l’abandon

05/07/2010
La vieille garde électorale de la 5e République qui va de la droite républicaine au parti communiste, celle qui recueillait environ 90% des suffrages à chaque élection, franchit désormais à peine la barre des 60%, comme si un monde était en train de disparaître, celui des vieux partis issus de l’après-guerre, quand ils ne venaient pas quasiment du début du 20e siècle. Socialistes, communistes, centristes, gaullistes, de SFIO en PS, d’UNR en RPR puis UMP, de MRP en R.I puis UDF, de PCF rouge flamboyant en PCF à l’agonie, ils ont fait les grandes heures de la 5e République, présidentielles et législatives, ils étaient entre eux au fond des urnes.

Quand le FN s’invite au festin
Souvenez-vous, ce partage entre gauche et droite dite républicaine incluant le centre, c’était 93% des suffrages à l’élection présidentielle de 1965, 94% à celle de 1969, 91% en 1974 répartis entre Mitterrand, Giscard et Chaban Delmas (il n’y avait pas de candidat communiste cette fois-là), et encore 88% en 1981 avec Mitterrand, Giscard, Chirac et Marchais, un quatuor qui ne sera jamais égalé !
La première alerte date de 1988 quand Le Pen s’invita au festin avec ses 14%, reléguant ce qu’il appelait « la bande des quatre » à 77% des suffrages. Et la suite ne sera qu’une succession d’éparpillement des voix, à tel point qu’au premier tour de la présidentielle de 2002, ces partis traditionnels ne recueilleront que 45% des voix (Chirac plus Jospin, Bayrou et Hue).
En 2007, la famille centriste quitte le « club » et vole de ses propres ailes pour s’offrir un score de grand parti avec 18,5% au premier tour sous la houlette d’un François Bayrou qui faisait un podium. Mais un centre qui ne reconnaissait plus son centre de gravité car ayant embarqué nombre de déçus de quelque chose : des Chiraquiens, des socialistes anti-Royal, des écologistes sans véritable force de combat (Dominique Voynet fit 1,5%)…

Eparpillement institutionnalisé
Si le Front national est venu créer une « bande des cinq » à partir de 1988, confirmée en 1995, Le Pen étant à chaque fois autour des 15%, l’éparpillement est devenu une affaire quasi institutionnelle à partir des années 2000, on se souvient que 12 candidats ont obtenu plus de 2% à la présidentielle de 2002, cet éparpillement fut d’ailleurs fatal au candidat Jospin.
Changement de siècle et de millénaire, et changement de paysage politique national parce que les électeurs ne sont plus fidèles à une famille, parce qu’ils sont plus facilement « en colère » contre quelque chose ou quelqu’un, parce qu’ils ont peur, et peut-être aussi parce qu’ils ne savent plus vraiment ce qu’ils veulent. Extrêmes gauche et droite, chasseurs, droite dissidente (Madelin) et gauche dissidente (Chevènement, Mélenchon), écolos officiels et non labellisés, toutes les élections sont désormais rythmées par ce qu’on appelle les surprises : Le Pen en 2002, Bayrou en 2007, les Europe Ecologie aux européennes en 2009… finalement tous un peu héritiers de Jean Lecanuet et ses 15,5% de 1965 face au Général de Gaulle et à François Mitterrand.
Mais ces « surprises » ont souvent du mal à s’inscrire dans la durée, d’autant que toutes les élections ne sont pas à analyser à l’identique. On peut faire 20% aux européennes et 14% aux régionales, et retomber à 4,7% aux législatives suivantes, voire, à l’instar du MoDem, passer de 18,5% à la présidentielle à moins de 5% seulement trois ans plus tard.

Pour le coup d’après…
Il n’empêche que cette redistribution perturbe les grandes formations, et tant à l’UMP qu’au PS on recherche la parade, ou l’alliance idoine pour le coup d’après. Celui de 2012 par exemple, où l’on s’affrontera pour le pouvoir national. Comment Nicolas Sarkozy (s’il est candidat) va-t-il manœuvrer pour se découvrir un allié qui lui apportera un peu d’air au second tour ? Faut-il lancer Hervé Morin et son Nouveau Centre et donner satisfaction à une famille alliée qui ne se reconnaît plus dans le MoDem, faut-il pousser une candidature de l’ouverture pour ratisser quelques points à gauche qui reviendront (reviendraient ?!) à droite au second tour genre Kouchner ou Besson, faut-il souhaiter une candidature Villepin, avec tous les risques de dérapages durant la campagne électorale, quitte à promettre Matignon pour après ? Et à gauche, que faire des verts actuellement à la recherche d’un véritable statut entre « mouvement polymorphe » façon Duflot et « coopérative politique » façon Cohn-Bendit, est-ce mieux de les laisser partir seuls avec le risque de les retrouver à plus de 10% avec des exigences démesurées pour un soutien franc et massif au second tour, ou vaut-il mieux signer pour un ticket PS/Verts dès le premier tour, ce qui nécessite de passer à l’entente cordiale au moment du choix du candidat… forcément socialiste ?
On le sait, c’est dans la marge que la présidentielle peut se jouer : quel sera le score de Marine Le Pen (il ne fait aucun doute qu’elle sera la candidate du FN), quel sera le score du Front de Gauche et qui montera sur scène de Buffet ou de Mélenchon ?
Enfin, il y a François Bayrou, qui sait désormais qu’il ne sera pas Président de la République, il aura au mieux la possibilité de négocier un ou deux ministères (mais avec qui ?), plus peut-être un « aménagement » financier pour rembourser sa campagne s’il fait moins de 5% des suffrages.
Mais après tout, tout cela peut être caduc si Nicolas décide de ne pas y retourner…

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