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Sarkozy fatigue, dérange, agace…

05/07/2010
« Sarkozy fatigue, emmerde. C’est le vol du bourdon qui trouble la mouche tsé-tsé » écrivait André Bercoff à l’automne 2008. Comprenez, il est fatiguant à vouloir réformer une France endormie qui, finalement, se trouve pas si mal que ça avec ses bataillons de fonctionnaires d’un côté, des bataillons d’assistés de l’autre, et au milieu un secteur marchand qui se réduit comme la peau de chagrin qui se racornit à chaque désir satisfait par l’Etat, un secteur marchand (ou privé) dans l’impossibilité d’être efficacement concurrentiel une fois que les 56% du PIB auront été prélevés pour faire tourner l’usine à gaz nationale. Et apparemment ce n’est pas suffisant à entendre ceux qui monopolisent la parole et la rue.

De la réforme en question
A coups de sondages on nous explique que les Français regrettent Chirac, les mêmes qui regrettaient Mitterrand sous Chirac, on nous dit même désormais que deux Français sur trois ne veulent pas que Sarkozy se représente. Mais quelles furent les grandes réformes structurelles engagées durant les 26 années de leurs présidences cumulées ? la retraite à 60 ans, la 5e semaine de congés payés et les 35 heures ne sont pas des réformes, au mieux des cadeaux électoraux.
Alors que tout le monde est d’accord sur le sujet, il faut réformer en profondeur, tout le monde (sont-ce les mêmes ?) semble unanime sur le fait qu’il n’y a rien qui presse, qu’il faut laisser du temps au temps, discuter, réfléchir, rediscuter… et enterrer la réforme car trop compliquée à appliquer, dangereuse électoralement (pour nos chers parlementaires), et surtout soumise à l’approbation de syndicats qui représentent à peine 10% des salariés. Sans vouloir faire un bon mot on dira que le réformateur réforme à tort !
Et l’autre, à l’Elysée, il s’entête sur cette voie, et l’exemple des retraites est significatif : ça va lui coûter sa place en 2012 entend-on déjà. Pourquoi alors le patron de F.O. Jean-Claude Mailly parle-t-il de « propagande électorale » à ce sujet ? Veut-il dire qu’il n’y a pas d’urgence et que le déficit annuel (déjà de 30 milliards pour 2010) annoncé par le COR, le Conseil d’Orientation des Retraites, qui sera de l’ordre de 77 à 114 milliards d’euros d’ici à 2050 n’est qu’une goutte d’eau ? On croit surtout qu’il ne faut rien précipiter, ne pas déranger ses seuls adhérents, ceux de la Fonction Publique. Cela relève de l’assiette au beurre. On pourrait rappeler à Monsieur Mailly que ceux qui auront 60 ans dans 60 ans sont déjà nés. Réformer les retraites aujourd’hui, c’est éviter de transformer les actifs de 2030 ou 2040 en véritables esclaves au service des gens qui passeront trente à quarante ans en retraite, avec corollairement tout ce que cela représente en dépenses de santé. Venant au secours des conservateurs, Jean-Luc Mélenchon explique que « si dans un moment d’égarement ils disent oui à une réforme des fonctionnaires  (dont la pension est calculée sur les 6 derniers mois contre les 25 meilleures années dans le privé), on ne pourrait le faire car il n’y a pas de données informatiques au-delà de six mois. » On se fout de qui ?

Donc, il fatigue !

Sarkozy fatigue, emmerde… la mouche qui dort, et surtout il dérange ce microcosme bien élevé qui a pris du grade sous Mitterrand et qui, après tout, s’est bien fait à l’immobilisme chiraquien. Jamais Président de la République n’aura été autant fustigé, dénigré, mis au ban de l’intelligence universelle par cette élite parisienne et provinciale imbue de son importance. Lorsque des confrères fort connus écrivent que « le pouvoir n’a pas eu le temps de tout détruire à cause de la crise », ou « qu’il n’est pas le bon Président de notre époque », d’autres doutant carrément de sa légitimité, tout cela ressemble à un lynchage médiatique qui ne sert pas à favoriser tel ou tel opposant, mais uniquement à détruire un homme qui est quand même, qu’on le veuille ou pas, le Président de la République.  Et tout est bon, même son déplacement au Plateau des Glières, haut lieu de la Résistance, est contesté par une association dénommée « Citoyens résistants d’hier et d’aujourd’hui » (comme si la patrie était en danger !) qui s’insurge contre la venue du Président de la République : qui, d’après elle, « se sert de la Résistance pour exister médiatiquement ».  C’est franchement n’importe quoi !
Mais on a l’habitude, d’autres cibles ont bien servi, de Bush à Berlusconi tout a été dit, on a même évoqué le côté fascisant du Président polonais décédé récemment.
Aujourd’hui, les attaques sont concentrées sur la réforme des retraites, hier c’était le débat sur l’identité nationale, demain on lui reprochera de nommer les ministres.
Mais c’est vrai aussi que Sarkozy fatigue. Qu’a-t-il besoin de s’occuper de tout, comment peut-il être aussi mal conseillé, et pourquoi cette obsession à vouloir faire de la France un laboratoire du traitement du CO2 au risque de mettre en péril certaines filières industrielles déjà naturellement en danger, on l’a vu avec le secteur automobile. De plus le bénéfice est en-dessous de zéro : ça grogne dans la rue et ce sont les Verts qui raflent les bénéfices de l’affaire.
On pourrait aussi parler des erreurs de casting, des ministres pas toujours au mieux de leur forme, et du manque d’enthousiasme de nombre de parlementaires face aux réformes qu’ils n’ont pas envie d’expliquer une fois dans leur circonscription, ou qu’ils ne savent pas expliquer.

Les caisses sont vides

Le taulier nous avait prévenus lors de son installation à l’Elysée, « les caisses sont vides ». Le ton était donné, chacun aurait dû comprendre EFFORT ! Mais non, à ExceptionLand c’est loisirs à volonté, soleil, baignade, week-ends et vacances, même si le ciel s’assombrit. Pas question de se priver, il en faut toujours davantage. D’où les déficits, d’où la dette (passée de 110 milliards en 1981 à 1.300 milliards en 2007, et au-delà des 1.500 milliards en 2010), d’où le poids des charges sur les salaires (voir chronique « une histoire à 17.146 euros ») avec pour conséquences les délocalisations et le chômage. Le drame, c’est qu’apparemment personne ne veut écouter les « alarmistes », en France c’est toujours Daladier revenant de Munich en 1938 avec des promesses de paix dans sa valise ! Pire, les élus continuent à embaucher massivement des fonctionnaires chaque année. Et ce sont des demandes d’emplois supplémentaires chez les cheminots, dans les hôpitaux, dans les prisons, dans la police, la justice et bien sûr à l’Education nationale, premier poste budgétaire mais cruellement sous-équipée en personnels et moyens.
Et tout ça à cause de Sarkozy qui a décidé de casser la France, par plaisir sans doute. Une France sous-industrialisée qui a perdu quelque deux millions d’emplois dans ce secteur depuis les années 80, une France qui pense encore qu’entre des services publics pléthoriques (car c’est quand même la réalité, il suffit de comparer avec nos voisins européens) et un secteur privé uniquement tourné vers les services et le tourisme, elle pourra trouver ses ressources pour s’acheter tout ce qu’elle ne fabrique plus, c’est-à-dire quasiment tout. L’argent dont nous avons besoin vient de ce que nous vendons. C’est ce qui fait la différence avec notre voisin allemand qui a su préserver son industrie intermédiaire et mettre d’importantes réformes en chantier il y a une dizaine d’années. Bien sûr, le pays subit la crise comme nous, mais s’en affranchit plus facilement, déjà parce qu’il n’a pas les mêmes frais fixes que nous pour faire tourner le pays (retour aux 56% du PIB en dépenses publiques).
Que faut-il faire ? J’ai bien une réponse, et elle n’engage que moi. Je serais le « Petit Nicolas » j’annoncerais un soir au 20 heures : « Françaises, Français, je vous propose de réformer le pays, vous ne voulez pas, dans ces conditions je ne me représenterai pas. »
L’intelligentsia applaudira et vantera les mêmes projets mis en avant par Martine Aubry ou Dominique de Villepin, des gens propres sur eux, et surtout issus des grandes institutions nationales, genre ENA. On sera entre nous, on aura bouté le Magyar hors nos murs, l’usurpateur sera parti faire du business ailleurs comme Clinton ou Blair. Mais eux on les aimait bien. Allez comprendre…


Fernand Hurt

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