En ce beau matin de juin 2001, Lorenzo Moscati, bientôt trente ans, tout à son bonheur de partager son existence avec Francesca, ne voit pas la voiture qui va le renverser. Allongé sur le bitume, il revoit sa vie. Nous sommes en 1978, il a six ans. Son père est communiste, tous les dimanches il l'emmène sur la tombe de Gramsci, père fondateur du PCI et lui fait écouter les chansons de Fabrizio De André, alors qu'il préfère Lucio Battisti. Sa mère est toujours migraineuse. Les vacances il les passe chez son grand-père Nonno à Todi, il occupe son temps à observer les oiseaux dans le campanile, à pêcher. Le grand-père à la maison, on en parle pas, on est fâché avec lui à cause de son passé mussolinien : pendant la guerre il aurait commis des atrocités. Lorenzo l'adore. Ce sont les années de plomb marquées par l'enlèvement d'Aldo Moro, l'attentat de la gare de Bologne, les assassinats... Lorenzo et ses amis se passionnent pour le foot et l'AS Roma, surtout pas le Lazio, mais il écoute les matchs à la radio car son père ne veut pas qu'il fréquente les stades. Subitement les vacances à Todi seront interdites. Il grandit et préfère les plages d'Ostie aux tomates de son grand-père. Il regarde les filles et rêve de devenir journaliste sportif. Parce que les histoires de fascisme-communisme lui ont volé son enfance, il quitte l'appartement familial, arrête l'école et prend un travail de serveur. Il en bave, mais ne se plaint jamais. Il devient militant, surtout pas communiste comme le lui a fait jurer son grand-père...
En ce matin de juin 2001, il git sur un trottoir, il n'aspire plus qu'à un bonheur individuel, vivre avec Francesca, enfanter, enfin magari, s'il plaît à Dieu, peut-être, si seulement...
Des années de plomb aux années Berlusconi, une jeunesse italienne et un très beau roman que l'on doit à Eric Valmir, correspondant de Radio France à Rome pendant cinq ans.
LE CHRONIQUEUR
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