C’est l’un des romans dont on a beaucoup parlé en cette rentrée. Félicité Herzog pensait-elle se retrouver au cœur de cette mêlée médiatique en écrivant sur ce « Héros », Maurice Herzog, son père ? Maurice Herzog, le héros de l’Annapurna en 1950, jeune homme qui reviendra déchiré physiquement de cet exploit, mais un exploit qu’il saura exploiter médiatiquement (déjà !) jusqu’à devenir ministre du Général de Gaulle, homme politique de premier plan des années 60 et homme à femmes également.
Félicité Herzog tue ce père séducteur qu’elle nous présente comme menteur, manipulateur, ce père absent qui abandonnera sa famille, créant d’autres déchirures, dont celle fatale qui frappera son frère Laurent. Et la fille du héros remonte loin pour régler des comptes familiaux, jusqu’à cet autre déchirement national que fut l’Occupation en mettant face à face deux France qui se haïssaient. Et pourquoi pas la Révolution, puisque dans ces familles où l’on vit dans des châteaux, toutes les rancoeurs, toutes les incompréhensions et tous les actes manqués ne remontent-ils pas à cette époque ?
Et comment vivre ce mensonge quand autour de vous il n’y a apparemment aucune ambiguïté : « Mais votre père, votre père, c’est un héros ! Un héros ! D’ailleurs, il faut que je vous dise, c’est mon héros… » C’est aussi ce que Félicité entendra à chaque station de ce chemin de croix. Mais plus lourd encore est le silence familial, les non dits et le mensonge. Ne pas casser le mythe, ne pas remuer le passé, ne pas parler librement car déjà la liberté est douteuse, assassine. Mieux vaut glorifier le « héros ».
LE CHRONIQUEUR
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