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Il est temps de passer au fédéralisme économique

22/10/2012
Au moment où les députés socialistes français avalaient leur chapeau en votant le Pacte de Stabilité élaboré au printemps par Merkel et Sarkozy, ce même Pacte contre lequel ils avaient ferraillé ferme en le stigmatisant durant la campagne électorale, la France et l’Allemagne entérinaient l’idée de supervision bancaire commune, système destiné à couper les liens entre les banques (6.000 en Europe) et les états, et qui sera opérationnel, si tout va bien, en 2014.
« L’Europe est en train de sortir de la crise » s’emportait aussitôt François Hollande oubliant un peu hâtivement que si le risque financier recule, le risque économique augmente proportionnellement, car ce n’est pas la monnaie qui améliorera la croissance en Europe mais la création de véritables emplois, en France comme ailleurs, et non pas des « emplois croupions » payés par l’Etat, donc destructeurs futurs d’emplois marchands.

 

Fédéralisme ou pas ?

Bien sûr, le Mécanisme Européen de Stabilité ou MES (dont Allemagne et France représentent 47% des contributions) peut recapitaliser les banques défaillantes, lever des fonds sur les marchés financiers, il peut intervenir afin de faire baisser les taux d’intérêts chez certains de ses membres, mais il faut aujourd’hui admettre que le système ne peut être réellement et durablement efficace qu’avec une véritable volonté de fédéralisme économique. Nous sommes désormais au bout des autres solutions cocardières, on le voit avec l’Espagne et l’Italie qui s’endettent à cause de taux d’intérêts prohibitifs compris entre 5 et 7%. Mettre de l’argent pour combler des déficits sans accompagnement, voire sans garantie ne sert à rien sinon à multiplier les situations à la grecque. Il faudra que chaque pays accepte de rogner sur ses parts de souveraineté, il faudra mettre en accord au niveau européen les retraites, les indemnisations du chômage, les prestations sociales, les politiques d’immigration… en fait tout ce qui induit de la dette.

Lorsque François Hollande annonce que « l’Europe est en train de sortir de la crise » on a envie de lui conseiller de sortir de son bureau, de son univers ultra protégé de responsable politique issu de la très haute Administration. Rien qu’en France, les demandes sociales explosent depuis l’été, RSA, allocations logement et aides diverses… il est temps de tout remettre à plat en expliquant aux populations ce que l’on peut actuellement faire et ne plus faire, faute de quoi la crise sera le prétexte à une démobilisation collatérale de tous ceux qui n’ont pas ou plus envie de faire partie de l’effort.

Mais ne rêvons pas, ce fédéralisme ressemble à un serpent de mer. On le glorifie, on le plébiscite, mais personne n’en veut vraiment, tout mettre en commun pour aller mieux n’est pas encore dans notre ADN. Croyez-vous que Mme Merkel soit disposée à quelques mois de législatives périlleuses pour elle à envoyer les fleurons de son industrie ouvrir de nouvelles usines en Espagne ou en Grèce afin de donner du travail à ceux qui en sont privés au sud de l’Europe ? Non, elle fait comme nous, elle se hâte lentement au-delà des discours mobilisateurs… du service minimum.

 

Et chez nous ?

C’est presque pire. Il suffit d’entendre M. Jouyet, fraîchement nommé à la Banque Publique d’Investissement (BPI), prévenir avec la froideur d’un haut rond de cuir que « la BPI n’a pas vocation à aider les canards boiteux » … de Florange. Tous ceux qui se battent pour leur job sur place auront apprécié le tact de ce grand commis de l’Etat qui a réussi à passer de la gauche à la droite et de la droite à la gauche grâce à de solides amitiés dans les deux camps. Au passage on notera qu’un haut fonctionnaire se permet de passer au-dessus de la volonté d’un ministre, celui du Redressement Productif, qui venait de prendre position en faveur des salariés d’Arcelor Mittal. Si la République avait encore un peu d’honneur, elle aurait dû virer dans l’heure ce fonctionnaire qui n’a été élu par personne…

Redisons-le clairement, ce n’est pas une supervision bancaire commune et la BCE qui relanceront la croissance en Europe par le biais d’une surveillance bancaire et l’injection thérapeutique d’argent frais. On ne soigne pas la lèpre avec de l’aspirine.

Quand le chômage des 18-24 ans est à 53% en Espagne, 35% en Italie, 24% en France (plus de 22% en moyenne dans la zone euro), il y a urgence à rebâtir un modèle, et ce n’est pas en descendant dans la rue pour réclamer une indépendance insensée comme en Catalogne ou en Ecosse, que l’on sortira la tête de l’eau.

 

Un super ministre des finances européen

On le sait, on le dit depuis vingt ans, il faut HARMONISER nos politiques sociales et fiscales, et ce sous la houlette d’un véritable chef comptable, sorte de super ministre des finances européen qui disposera d’un réel cadre juridique pour agir au nom des Etats. Puisque après tout nous avons dit oui à Maastricht, allons au bout de la démarche. Ceci aurait au moins l’avantage d’empêcher nos hommes politiques de nous prendre pour des quiches à chaque campagne électorale, se trouvant alors dans l’obligation de dire la vérité, rien que la vérité, toute la vérité.

Lorsque François Hollande niait la crise la foule applaudissait l’artiste qui allait nous montrer comment le rêve allait devenir réalité. Même Houdini n’aurait pas fait mieux ! Et c’est bien ce même Hollande qui plaide actuellement pour une politique de croissance tout en la flinguant dans les faits en massacrant les entreprises et les particuliers parce qu’il ne veut pas toucher aux dépenses publiques et sociales.

Là encore, un fédéralisme économique – et rappelons-le, seulement économique, il n’est pas question de demander aux Portugais de vivre comme les Danois – nous contraindrait à nous aligner sur le meilleur dénominateur commun du moment en Europe, donc de faire aussi bien par exemple en matière de services publics que certains pays qui trouvent l’efficacité sans pour autant afficher des effectifs plus pléthoriques que l’Armée Rouge. 

« Dépenser mieux et travailler mieux » face au dépenser plus et travailler moins qui gangrène aujourd’hui notre société, et ce en fait depuis déjà pas mal de temps. Faute de quoi il ne nous restera plus qu’à voir venir l’hiver tueur de pauvres gens comme disait « la chanson des gueux » de Jean Richepin.

 

J. Nimaud

 
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