Une mauvaise base
Ce n’est pas dans la poudreuse que le pouvoir s’enfonce, mais dans les sables mouvants, d’où l’inquiétude grandissante des socialistes face à l’avenir proche, celui qui aura pour date de péremption le printemps 2015 : municipales, européennes, cantonales et régionales pourraient coûter des milliers de permanents payés par le contribuable dans toute la France au Parti Socialiste et à ses alliés gouvernementaux. Et certains de se poser clairement la question : une présidence et une majorité à l’Assemblée valent-ils que le parti perde les bijoux de la couronne, à savoir les principales villes moyennes et grandes, et la moitié des départements et des régions en 2014 et 2015 ? Pas si sûr. Surtout si l’on est justement maire ou président d’un conseil général ou régional, et ce sans avoir été qualifié pour un poste ministériel. Et en ces temps de crise où n’importe quelle mauvaise nouvelle peut vous tomber dessus à la vitesse d’un Rafale traquant le djihadiste motorisé sur la D12 à la sortie ouest de Bamako, se retrancher dans un fief est encore le meilleur moyen de passer à travers l’averse ou le déluge.
Dans ce sens, on peut légitimement conseiller à des émissaires du PS de contacter Dominique de Villepin afin de savoir comment ce dernier avait réussi à convaincre Jacques Chirac de dissoudre en 1997…
Mais alors, pourquoi une telle dégringolade en si peu de temps ? Tout simplement peut-être parce que l’élection a été gagnée sur un programme intenable, notamment en matière économique, ce que les socialistes savaient mais ont tenté de cacher. Intenable car il était basé sur des prévisions de croissance infondées et sur la négation de la crise européenne. On allait voir ce qu’on allait voir. Et on a vu, on a vu que la taulière était Mme Merkel et que les promesses n’avaient engagé que ceux qui les avaient écoutées. Cette mauvaise base ne pouvait tenir au-delà des trois mois d’état de grâce. A peine plus.
Exercice risqué
Alors que faire ? Ce que de Gaulle a réussi en 1968 et ce que Chirac a raté en 1997, dissoudre pour remettre les compteurs à zéro, et surtout pour offrir à François Hollande une fenêtre de tir pour 2017. Une dissolution juste après les municipales entraînera forcément le retour de la droite aux affaires, ce qui laissera au Président trois années de répit. Si les résultats ne sont pas au rendez-vous pour le gouvernement de cohabitation, François Hollande pourrait envisager une réélection au printemps 2017. Il sait que les Français sont volages, changer de cap une nouvelle fois ne leur ferait pas peur. Dans le cas contraire, c’est le Premier ministre de cohabitation qui serait le mieux à même de rafler le titre.
Dissoudre est un exercice périlleux, François Mitterrand avait réussi en 1988, mais les circonstances étaient différentes, il sortait de deux années de cohabitation et venait d’être largement réélu face à Jacques Chirac. Quant à celle de 1981, elle était encore plus logique… et gagnée d’avance.
Bien sûr, il y a l’autre solution, la plus normale dirons-nous, ne rien faire et espérer que les choses s’arrangeront. Il faudra changer de Premier ministre si la défaite est lourde aux municipales de 2014, changer de Premier ministre et de politique. Mais cette fois-ci, ce sont ses alliés les plus à gauche qui feront entendre leur voix : soit il va vers plus de libéralisme et moins d’Etat et il s’isole sur sa gauche, soit il accorde plus d’attention à sa gauche extrême, et là il s’enfonce totalement vers l’irrationnel et le suicidaire. Mélenchon et le Parti Communiste ne seront jamais à 20 ou 30% à ce moment-là.
A un an des municipales, donc des prochaines échéances électorales, les paris sont ouverts : dissoudra ou dissoudra pas ?...
F. Hurt
LE CHRONIQUEUR
Les Commentaires