Au point de vue météorologique, on sait que les extrêmes de la chaleur ne se rencontrent pas aux mêmes heures que les extrêmes de la pression. Mais si cette dernière s’avère être trop forte, la température va monter obligatoirement…
Et c’est ce qu’il se passe aujourd’hui : crise européenne, emplois menacés et promesses électorales non tenues (et par ailleurs non tenables !) suffisaient à mettre les contestataires dans les starting-blocks, prêts à en découdre, nous n’avions pas besoin de ces sales affaires politico-financières pour ajouter du grain à moudre à cette fronde qui grossit, peut-être encore de manière larvée, mais qui pourrait faire surface à la moindre étincelle. C’est par exemple ce que souhaite Jean-Luc Mélenchon avec son « Barnum » du 5 mai, faire de ce jour le point de départ d’une nouvelle lutte des classes basée sur l’indignation générale. Un départ sans retour en arrière possible, un départ vers une grande inconnue.
Combien de divisions ?
On sait que le bonhomme pesait environ 10% avec ses alliés du PCF, que vaut-il seul, car il serait étonnant que les communistes envisageassent une seule seconde de tout casser à moins d’un an d’importants renouvellement de baux dans leurs municipalités, là où ils ont impérativement besoin du soutien des socialistes. Il suffit d’écouter André Chassaigne, député communiste du Puy-de-Dôme critiquer ouvertement l’attitude de son « collègue » du front de Gauche. Mélenchon seul à la bataille, le risque est grand pour lui, car si ses défilés ne mobilisent pas plus que ce qu’il représente dans les urnes, la révolution risque d’attendre encore un peu.
Côté Marine Le Pen les choses sont différentes. C’est avec ses seules troupes qu’elle a frôlé les 20% l’an passé, des troupes qui, à n’en pas douter, ont dû quelque peu grossir ces derniers jours, et qui pèseront bien plus que celles de Mélenchon une fois dans la rue. Concrètement, il est probable que le FN profitera davantage de ce scandale Cahuzac, d’abord parce qu’il n’est pas l’allié du PS, contrairement à Mélenchon qui vient de cette famille et qui a voté Hollande en 2012, et ensuite parce qu’il peut arguer de toute indépendance vis-à-vis des pouvoirs successifs de ces trente dernières années, ce qui, une fois encore, n’est pas le cas de Mélenchon, qui fut même ministre de la Gauche Plurielle.
Voilà où nous conduisent ces gens qui se conduisent mal : on voudrait nous faire croire qu’à partir de maintenant, seuls des partis populistes, habilités à manier le balai, pourraient gouverner la France de manière honnête et sincère. Comme si les effets de la mondialisation, des délocalisations, de la désindustrialisation de la France (due aussi en partie parce que les Français ne veulent plus travailler en usine), de la crise économique, de l’expansion des déficits et de la dette que l’on doit à un Etat trop coûteux, comme si tous ces effets avaient trouvé leur point limite avec l’affaire Cahuzac, cette goutte qui fait déborder le vase, peut-être ce vase d’Amathonte si cher aux Chypriotes.
Mais ne soyons pas dupes à ce point, Mélenchon et Le Pen n’espèrent qu’une chose, ramasser le pouvoir dans le caniveau, et pour ce faire ils nous bradent leur populisme comme un lot de pantoufles fourrées un 15 juillet à 5 heures. Ce n’est pas en envoyant les condottieri de la révolution que l’on sortira le pays de ses contradictions. Front de Gauche et Front National n’apporteront pas les réponses que le peuple attend. En fait, c’est au peuple d’apporter des réponses, c’est au peuple de sortir de ses contradictions. N’oublions pas que le pouvoir honni aujourd’hui est en place depuis moins d’un an, n’est-ce pas un peu court pour tout balayer comme l’estiment Mélenchon et Le Pen ? Ou alors, comme le suggérait Brecht, « il faut dissoudre le peuple ».
F. Hurt
LE CHRONIQUEUR
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