Lorsqu’on demande aux Français comment ils voient leur vie sur l’échelle du bonheur d’un collègue à Richter, globalement, ils pensent être moins heureux qu’au Bénin ou en Namibie, des pays où la seule préoccupation quotidienne est de trouver à manger. Non pas dans un hyper avec bouffe à profusion payable le 30 du mois suivant, l’équivalent d’un crédit de cholestérol, mais tout bêtement un truc, même pas très frais, pour nourrir sa famille. Quant à se soigner gratuitement, regarder un excellent Lorient – Le Mans sur écran plat en se goinfrant d’une tonne de sel et de sucre, partir en vacances l’été, à la Toussaint, à Noël, en février et à Pâques, se foutre en grève parce qu’on ne va pas embaucher 4 millions de fonctionnaires nouveaux l’an prochain, bref tous ces petits trucs quotidiens qui nous rendent la vie infernale, au Bénin et en Namibie ils n’ont pas, ils sont heureux. Je vous le dis, il leur faut juste trouver à manger et essayer de ne pas mourir dans la semaine. Sous le soleil certes, mais c’est déjà du boulot !
Vous me direz, si c’est une question de soleil, on peut toujours aller se faire voir chez les Grecs, entre grèves et manifs on sera un peu chez nous. De plus, nos élus pourraient aussi faire comme Nana Mouskouri, abandonner leur retraite de parlementaire par solidarité avec les plus dépouillés par la crise. Non, je déconne !
Et puis la France est pauvre, c’est dit, pauvre à hauteur de 10.200 milliards d’euros, c’est le patrimoine des Français. Sérieusement, il faudrait peut-être arrêter de se considérer comme les plus malheureux de la planète. Est-ce un effet Doppler dû à de mauvaises ondes ou une sorte d’hallucination qui me rappelle Scaron parodiant Virgile : « J’aperçus l’ombre d’un cocher qui tenant l’ombre d’une brosse, nettoyait l’ombre d’un carrosse. » Serions-nous plus que l’ombre de nous-mêmes ?
LE CHRONIQUEUR